❝괜찮아 괜찮아 우리 둘 밖에 없어❞
Est-ce que ça vous est déjà arrivé de penser à quelqu'un que vous n'avez pas vu depuis longtemps puis soudainement avoir des nouvelles ? C'est ce qui m'est arrivé il y a quelques semaines déjà. Je repensais à ce mec, Hayden, que j'avais rencontré à Paris et... il m'avait pas mal plu. Il a été un de ces crush que j'ai eu à l'époque même si je n'ai jamais compris pourquoi, il n'était pas du tout mon genre et puis il était quand même plus âgé de cinq ans. Enfin bon, je ne sais pas vraiment pourquoi je me suis mise à penser à lui, peut-être que le fait d'être en Corée m'a amené à me demander ce qu'il devenait aujourd'hui.

Enfin bon, le fait d'avoir pensé à lui à cet instant précis m'a fait tomber sur une affiche énorme dans les rues de Gangnam. J'ai hésité un moment, étant donné le nombre incalculables de cliniques de chirurgie esthétique, ça pouvait être une simple coïncidence genre quelqu'un qui lui ressemble après être passé au bistouri. Mais quand même, dans mes souvenirs Hayden avait quand même un visage un peu atypique pour un coréen. C'était forcément lui sur l'affiche. Apparemment il avait un lien étroit avec une agence. Était-il artiste ? Aucune idée. Mais je ne sais pas pourquoi à cet instant, j'ai eu l'idée d'aller lui rendre visite. Je n'avais aucune idée de si ça allait être possible de l'approcher comme ça mais comme je dis toujours, qui ne tente rien n'a rien.

C'est comme ça que quelques semaines plus tard je me suis retrouvée à l'entrée de cette fameuse agence. J'étais bien décidée d'aller lui rendre visite. A l'époque où l'on se fréquentait à Paris, on était plutôt proches, je l'appréciais vraiment. Je sais pas ce que ça donnerait aujourd'hui, chacun vit un peu sa vie depuis tout ce temps, mais j'ai vraiment envie de le revoir et de savoir s'il va bien.

Je me présente à l'accueil et je demande Hayden, l'hôtesse me regarde de travers comme si j'avais dit une énormité. Elle me fait un sourire finalement et me fait comprendre que je n'ai rien à faire là. Je ne comprends pas trop mais je n'ai pas fait tout ce chemin pour me faire recaler aussi facilement. Je fais semblant de me diriger vers l'entrée et à ce moment là, en tournant ma tête vers la droite, j'aperçois une silhouette familière. Hayden. Je me dirige doucement vers lui sans passer pour une hystérique vu qu'apparemment les gens ont l'air de penser que c'est ce que je suis, lorsque j'arrive à sa hauteur je lui adresse un énorme sourire.

« Hayden ! Mon Dieu, ça fait tellement longtemps, je ne savais pas que tu travaillais dans ce genre d'endroit, j'ai découvert ça il y a quelques semaines à peine... Comment tu vas ? Tu te souviens de moi ? »

En fait, j'aurais aimé lui sauter dans les bras à cet instant mais je ne voulais pas me faire remarquer et puis, je ne sais pas ce qu'il est devenu aujourd'hui, il est peut-être marié ou quoi, donc je ne veux pas m'attirer des problèmes.

❝괜찮아 괜찮아 우리 둘 밖에 없어❞
Je ne pensais pas à mal en me rendant à l'agence où travaillait Hayden. C'était une vieille connaissance, j'avais la possibilité de le revoir et de prendre de ses nouvelles alors pourquoi me priver ? Surtout qu'on avait passé vraiment de bons moments ensemble. La période avait été plutôt courte mais je la qualifierais d'intense. A chaque souvenirs que j'associe à mon ami, il se dessine un sourire sur mon visage. Tout simplement parce que je ne retiens que le bon. Du mauvais, il n'y en a pas eu des tonnes à vrai dire.

C'est pour ça que je me suis dirigée vers lui, toute heureuse de le retrouver en me contenant pourtant, j'aurais très bien pu lui sauter dessus si le contexte avait été différent. J'ai voulu m'assurer qu'il se souvenait bien de moi par principe mais je ne pensais pas que la réponse à cette question serait négative en fait. D'ailleurs je ne m'attendais pas du tout à l'ensemble de sa réponse, j'étais pour ainsi dire sur le cul. Il se dirige vers l'ascenseur et je le rattrape avant qu'il ne m'échappe.

« Pardon ? Attends, t'es sérieux là ou tu me fais marcher ? Je suis pas du tout là pour ces fichues auditions, ça ne m'intéresse pas le moins du monde. Et bah putain, j'étais venue là simplement pour prendre de tes nouvelles... »

Ce me dégoûtait vraiment d'avoir entendu ces mots, et le pire c'est qu'il avait l'air sérieux au point de me glisser une carte de visite dans ma main. Non mais c'est quoi son délire ? Qu'est-ce que j'ai fait de mal pour mériter d'être effacée et considérée comme une moins que rien ? Je veux dire, certes on n'a pas gardé contact après tout ce temps, mais lorsque l'on s'est quitté c'était sur une bonne note, il me semble...

« Visiblement tu as bien changé depuis la dernière fois qu'on s'est vus à Paris. Je ne pensais vraiment pas que tu me rayerais comme ça de ta vie, dire que j'ai osé me demander ce que tu devenais alors que tu fais semblant de ne pas savoir qui je suis. »

Je regarde autour de moi avant de jeter un coup d'oeil à la carte qu'il m'a glissée entre les doigts. Un petit rire nerveux m'échappe.

« Je vois, tu veux te donner une certaine image parce que tu diriges cette agence, donc forcément fréquenter une petite jeune comme moi, ça casserait ton image. Forcément. »

J'étais pourtant toute excitée en arrivant sur les lieux, je ne m'étais vraiment pas préparée à une telle réaction de sa part. Vous savez, être ignorée c'est pire que d'être méprisée. Tout un tas de souvenirs remontaient à cet instant. Ces moments où l'on allait boire un chocolat dans un café ou qu'on allait manger une crêpe, c'est moments passés à mon appartement pour se mater des films ou des séries, toutes ces petites choses qui peuvent paraître insignifiantes mais qui m'ont vraiment rendue heureuse le temps de quelques semaines. Mais là, ça me donnait presque envie de pleurer. Visiblement j'attache beaucoup d'importance à ces choses mais pour lui ça n'était rien du tout. Je ne comprends pas pourquoi j'ai toujours cette tendance à donner de l'importance à des personnes alors que moi, je ne compte pour personne. Je suis juste une connaissance parmi tant d'autres, mais je n'ai pas le sentiment qu'autour de moi les gens se disent "Oh j'ai vraiment envie de voir Anna", alors qu'il y a tout un tas de personnes auxquelles je pense souvent.

L'ascenseur arrive mais je lui bloque l'accès. Je ne veux pas le laisser partir sans qu'il ait répondu. Même si ça risque de me faire encore plus mal, je ne peux vraiment pas le laisser m'échapper comme ça. J'ai fait tout ce chemin pour prendre de ses nouvelles pour être considérée comme une simple gamine qui veut devenir idole ? Non mais c'est trop pour moi.

❝괜찮아 괜찮아 우리 둘 밖에 없어❞
J'étais bien déterminée à obtenir une réponse de la part de Hayden. Il allait bien finir par admettre qu'il faisait semblant de ne pas me connaître, c'était pas possible autrement à moins d'être amnésique. Je sais que le ton employé n'allait pas lui plaire étant donné son statut dans l'agence, j'en étais désolée pour lui mais à cet instant j'étais tellement dégoûtée et tellement emplie de haine que je ne pouvais pas rester calme, je suis comme ça.

Je tente de l'empêcher de passer, comme si mon petit corps de rien du tout pouvait y faire quelque chose face à lui. Je prenais le risque de me faire mal, de recevoir un coup - même si je doute qu'il ne me frappe en public. Mais sa réaction fut toute autre. Il me poussa dans l'ascenseur et m'embarqua avec lui. J'étais pas bien, sincèrement. Je suis pas de nature claustro mais là c'était limite. C'est la situation, me retrouver seule avec quelqu'un que je viens visiblement de mettre en rogne, y a rien de rassurant. Et j'avais bien raison. Il employa un ton qui me fit presque peur. Je ne l'avais jamais vu comme ça. Il m'assura qu'il ne voyait pas du tout de quoi je voulais parler et ce qui me surprenait c'est qu'il avait l'air sincère. Et puis, pourquoi mentir alors qu'on était que tous les deux dans l'ascenseur ? J'avoue qu'à l'entente de ses paroles, j'étais un peu perdue.

Toujours aussi énervé, il me coinça contre les parois de l'ascenseur. Help, je commençai à devenir une vraie claustrophobe là. Il me demanda de lui donner une preuve de ce que j'avançais et que seulement après, on pourrait en discuter calmement. Il y avait un truc qui clochait dans son discours. Il avait l'air tellement sincère à dire qu'il ne savait pas qui j'étais et en même temps, il avait l'air de douter de ce que je disais, il n'aurait pas demandé de preuves. Mais qu'est-ce que j'allais lui donner comme preuve ? Un des nombreux petits secrets qu'il m'a dit lorsqu'on était à Paris ? Je ne suis même pas sûre de m'en rappeler. Ou alors quelque chose qu'il aime par dessus tout ? Mais ça, ça doit être connu de tous les médias, donc c'est nul.

Il me traîna ensuite en dehors de l'ascenseur et s'adressa à une femme en lui demandant de ne laisser entrer personne. Je crois que ma fin était proche à cet instant, pour tout vous dire, j'avais les chocottes. Qu'est-ce qui m'avait pris d'aller le voir, hein ? Je ne pouvais pas simplement aller faire un peu de shopping avec Yu Ra ? Et bah non, il faut que j'aille m'attirer des ennuis alors que mon autorisation de séjour ne tient qu'à un fil. Je me retrouvai alors seule avec lui dans ce qui semblait être un bureau.

Il me fallait donc une preuve. J'avais bien une idée mais... Mais bon c'était la seule solution. Une des photos qu'on avait prises ensemble à l'époque se trouvait sur Facebook, le fait est que j'avais à chaque fois une tête des plus atroces dessus - même s'il disait le contraire. Sauf que là, c'était une question de vie ou de mort, je n'avais pas d'autres choix que de lui montrer. Parce que même si je pouvais très bien mentir et "admettre" que j'étais juste une fan pour m'en aller tranquille, lui il allait pas me laisser tranquille à ma guise. Je suis certaine qu'il aurait été prêt à me poursuivre en justice.

« Et bien... si tu me laisses le temps de retrouver la photo sur Facebook, tu verras bien que je n'ai rien inventé. »

Je fais une petite recherche rapide à travers les albums, j'en avais créé un spécial pour lui en plus, toutes nos petites sorties à Paris, à Versailles ou même notre Week-End à Londres... Tout y était. Il n'y avait que l'embarras du choix. Je cliquai sur ma préférée devant la Tour Eiffel et lui tendit mon portable.

« Est-ce que j'ai l'air d'inventer ? Et puis tu vois bien la date, ça remonte à quelque temps déjà. »

J'espérais sincèrement qu'il reconnaisse mes dires. Je ne sais pas pourquoi il insiste autant sur le fait qu'il ne me connaisse pas. Je ne pensais pas avoir été aussi insignifiante. Même s'il doit croiser beaucoup de monde tous les jours, quand même...

❝괜찮아 괜찮아 우리 둘 밖에 없어❞
Je n'étais vraiment pas à l'aise dans ce bureau. Je n'avais plus le sentiment de le connaître tant sa réaction était surprenante. Honnêtement, je n'avais pas imaginé que si on se retrouvait un jour il allait réagir de la sorte. Je m'attendais à tout, genre le gars marié qui ne veut plus me voir parce que ce serait compromettant pour son couple, ou alors la réaction de tout à l'heure mais seulement en public. Or là, jusqu'au bout il semblait ne pas me reconnaître. C'était vraiment étrange. Si c'était un jeu d'acteur et ben, j'étais vraiment bluffée.

Que pouvais apporter de plus que ces photos ? Il pouvait toujours penser que c'étaient des photos-montages, mais ce serait vraiment pousser le vice. J'avais du mal à accepter le fait d'être obligée de ressortir ces vieux souvenirs simplement pour qu'il croit quelque chose qu'il devrait pourtant savoir. Je tremblais tellement, je lui avais tendu mon téléphone pour qu'il comprenne que je ne mentais pas. Mais je stressais parce que je ne savais pas si ces photos allaient être suffisantes. Peut-être est-ce qu'il était devenu assez vicieux pour trouver des excuses improbables pour ne pas me croire. Ouais, le stress me rendait complètement parano, je n'avais qu'une hâte c'était de me casser d'ici.

Sa seule réponse fut une grossièreté. Et ben, cache ton enthousiasme mon grand. Tu devrais être content de réaliser que tu connais une fille comme moi. Bon, c'est peut-être pas si cool que ça de me connaître en fait, mais quand même, c'est quoi cette réaction toute pourrie ? Et même pas il va me sauter dans les bras. Pff faire tout ce chemin pour ça. Je le regarde sortir une cigarette et se laisser tomber dans le fauteuil à côté du mien. Je le fixe, j'attends une réponse un peu plus pertinente, je sais pas moi, des excuses au moins. Attends, il ne va quand même pas VRAIMENT rester sur sa position en mode, on s'est jamais rencontrés, si ?

Il finit par admettre et à ce même moment mon coeur calma sa course folle. J'étais un peu rassurée, déjà. Mais maintenant j'avais besoin d'explications quant à son comportement. Il n'aurait même pas eu à me demander ces photos s'il n'y avait pas un problème. Et là il ajouta, sans même que je ne demande quoique ce soit, qu'il ne se souvenait de rien. Donc la théorie de l'amnésie était donc la bonne. Mais comment ? Il devait lui être arrivé quelque chose mais je ne savais pas quoi et je ne me voyais pas, dans l'état actuel des choses, lui demander. Il poursuivit, s'excusant de ne pas pouvoir partager ma joie. Ben ouais, s'il m'a oubliée, c'est sûr que faire semblant ça doit être difficile. C'est pas comme si j'étais une beauté sublime ayant le même âge que lui. On a quasi cinq ans d'écart, c'était déjà particulier à l'époque où on s'est rencontrés mais le contexte était quelque peu différent. Il ajouta ensuite qu'il souhaitait que je garde le silence sur sa perte de mémoire. Même si la question de "pourquoi ?" effleura mon esprit l'espace d'un quart de secondes, je compris rapidement. Mais... Me payer pour ça, c'était une blague ?

« Pourquoi me payer ? Je sais garder ma langue, je n'ai aucun intérêt à aller dévoiler tes secrets à qui que ce soit. En tout cas, je suis soulagée de savoir que tu conçois que l'on se soit connus. »

Tellement de questions me vinrent à l'esprit. J'avais vraiment envie de savoir ce qui s'était passé. Et puis je voulais savoir ce qu'il devenait aujourd'hui, s'il était en bonne santé hormis cette histoire de mémoire. Après tout, j'étais venue pour ça à la base. Et puis j'avais aussi une envie folle de lui rappeler tous nos meilleurs moments, mais je crois qu'en fait c'était déplacé.

« Je m'appelle Noh Anna. Je suis juste venue pour prendre de tes nouvelles, j'espère que tout se passe bien pour toi en ce moment, ta famille, tes amis... Oh, peut-être est-ce que je devrais te vouvoyer étant donné que tu ne sais plus qui je suis, c'est peut-être déplacé de te parler de façon informelle... »

C'était beaucoup trop bizarre. J'avais envie de m'en aller tout de suite. Être obligée de repartir à zéro tout en sachant que les choses ne seront plus jamais pareilles. Je le sens bien que même si on se connaît et qu'il l'admet, il ne voudra pas en savoir plus. Nous ne sommes pas du même monde. Nous l'avons jamais été mais à l'époque, comme je l'ai déjà dit, tout était différent. Le contexte nous a amenés à être ce que nous étions.

❝괜찮아 괜찮아 우리 둘 밖에 없어❞
Les choses finissaient par s'arranger, je crois. Je n'avais pas du tout imaginé que les choses se passeraient de cette manière lorsque j'avais quitté mon petit goshiwon le matin même. Je n'avais pas pensé devoir me représenter auprès de mon ami, je ne pensais pas qu'il serait presque violent avec moi, je ne pensais pas être autant humiliée en l'espace de si peu de temps. Mais ça s'arrangeait. Est-ce qu'il allait bien ? C'était la seule chose que je voulais savoir, promis j'allais le laisser tranquille s'il le voulait après ça.

Il m'assura que ce n'était pas nécessaire de le vouvoyer. Ça m'arrangeait car ça aurait été très difficile pour moi de changer cette habitude. Il me semble que je ne l'ai jamais vouvoyé, même au tout début de notre rencontre. Il concevait le fait que je connaisse beaucoup de choses sur lui mais il me fit savoir également que parler de sa vie privée dans ces lieux allait être une chose compliquée, du moins ce n'était pas très sûr.

Les choses avaient tellement changé. Enfin, même s'il a toujours eu cette situation un peu spéciale comparé à moi, lorsqu'il était en France les choses se déroulaient autrement, je le sentais plus libre. Et puis maintenant que je savais qu'il avait perdu une partie de sa mémoire, je ne savais plus trop ce que j'étais autorisée à lui dire. Peut-être ne voulait-il pas savoir ce qu'il s'était passé précisément à cette époque, peut-être ne voulait-il pas que je lui rafraîchisse la mémoire sur ce qu'il m'avait dit de lui, surtout que je ne pouvais pas avoir la certitude qu'il m'ait dit les choses telles qu'elles étaient. Fausser sa mémoire n'était pas mon objectif.

Puis il me proposa finalement un marché qui me semblait équitable. Il me promettait de me dire tout ce que je voulais savoir en échange de tout ce qu'il voulait savoir lui. Finalement, il était peut-être prêt à recevoir des informations sur des choses qui s'étaient passées avant sa perte de mémoire. Mais... il fallait que je sache à quand remontait cet événement et surtout de quoi il se souvenait. Mais comme il avait dit, rien n'était sûr ici, je ne sais pas comment je devais poser mes questions.

« Ça me va, on marche comme ça. La première chose que j'aimerais savoir c'est.. quand ÇA s'est passé. Depuis quand est-ce que je ne fais plus partie de ton passé ? »

Cette information allait être utile pour que je puisse éviter de faire des bêtises. Quand j'y repense, c'est peut-être à partir du moment où on a commencé à ne plus trop discuter par kakao. Je voyais qu'il ne m'envoyait plus de messages et je ne voulais pas être la première à le faire, j'avais tellement peur de le déranger. Maintenant les choses deviennent légèrement plus claires dans mon esprit. Mais une autre question me vint, peut-être qu'il avait d'autres choses à faire que de discuter avec moi à ce moment là.

« Tu n'as pas de rendez-vous ? Ni de réunion ? Je veux dire, tu as peut-être des choses plus importantes à faire que de discuter avec moi. Je ne veux pas te faire perdre ton temps, on pourrait tout à fait se retrouver dans un café une autre fois. »

❝괜찮아 괜찮아 우리 둘 밖에 없어❞
J'avais posé ma première question qui me semblait la plus importante avant de pouvoir lui apporter la moindre information. Savoir quand s'était produit cet accident, enfin, ce qui avait provoqué sa perte de mémoire en tout cas, j'en avais vraiment besoin. Je pense qu'il allait comprendre que je lui pose la question. Après tout, maintenant nous avions ce deal, s'il voulait que je lui apporte des informations il allait devoir répondre à mes questions. Sa proposition me paraissait très équitable même si ça faisait un peu "intéressé". Je ne pouvais pas m'attendre à ce qu'il soit à nouveau l'ancien Hayden de toute manière.

Il répondit à ma question sans poser de problème. 2013, tout coïncidait. C'était vraiment peu de temps après qu'il ait quitté Paris et surtout ça correspondait à la période durant laquelle j'ai attendu désespérément un signe de vie et qu'il ne m'a plus jamais adressé la parole. C'est à cette période là que je me suis dit que ça ne servait à rien d'insister, persuadée qu'il avait à présent une vie de famille ou en tout cas, il commençait à en envisager une avec une femme de son âge et de son pays, surtout. Ça devait être horrible tout de même. Sa façon de me dire les choses me faisait imaginer la situation. Se réveiller un jour dans un endroit sans savoir où l'on est, qui on est. Je n'aimerais pas perdre mes souvenirs, je crois que c'est la chose à laquelle chaque être humains tient le plus.

S'il était encore celui que j'avais connu auparavant, je l'aurais pris dans mes bras pour le consoler. Mais je restai là, assise dans le sofa à l'observer. Il se dirigea vers un petit placard et se servit un verre de whisky. Je ne savais pas si c'était le bon moment pour lui dire mais si ça pouvait l'aider en quoique ce soit.

« 2013 donc... Tout coïncide. J'avais décidé de ne plus t'envoyer de message et d'attendre que tu m'en envoies, et tu as soudainement arrêté de donner des nouvelles. »

Ça me rassurait, il n'avait pas délibérément arrêté de me donner des nouvelles, malgré tout, je ne pouvais pas me réjouir de la situation. Il ajouta ensuite que, puisqu'il était le patron, il pouvait se permettre de faire ce qu'il voulait et il avait donc décidé que notre entrevue était plus importante que le reste. Je sais pas si je devais me sentir flattée, mais je pensais surtout à la pauvre femme de l'accueil qui allait finir par se demander ce que j'étais venue faire là. Enfin bon, si le patron a dit que c'était important... Il voulait que je lui raconte notre rencontre, un sourire se dessina sur mon visage.

« Notre rencontre... En fait, pour remettre dans le contexte, je suis d'origine coréenne mais j'ai toujours vécu à Paris. Ça ne fait que cinq mois que je suis à Séoul. A l'époque où l'on s'est rencontrés je venais tout juste d'entamer des études pour apprendre la langue coréenne et l'histoire de la Corée, donc j'essayais de rencontrer au maximum des coréens afin de pratiquer la langue et surtout pour avoir des connaissances une fois que je serais à Séoul. »

J'étais obligée de refaire un point sur la personne que je suis. Ce n'était pas juste reparler de notre rencontre, c'était vraiment repartir depuis le tout de début. Et si le Hayden d'aujourd'hui n'appréciait pas le fait que je sois une coréenne ayant vécu en France ? Et s'il n'appréciait pas le fait qu'on se soit rencontrés de la manière dont on s'est rencontrés ? Ça me faisait un peu peur de tout raconter, alors je fis une pause. Mais il me demanda de ne rien lui cacher car il avait déjà subit assez de mensonges sur son passé. Je comprenais totalement ce qu'il voulait dire, je repris donc mon récit.

« On s'est donc rencontrés grâce à un forum de rencontres, enfin plutôt de "correspondants". Tu disais rechercher des français ou françaises vivant à Paris et parlant un peu coréen pour t'aider à te repérer durant ton séjour. Alors on a discuté et le feeling est plutôt bien passé. On s'est donc donné rendez-vous dans un café assez rapidement. C'est comme ça qu'on s'est rencontrés... »

❝괜찮아 괜찮아 우리 둘 밖에 없어❞
Je me retrouvais donc à raconter à Hayden notre rencontre. Ça me faisait vraiment bizarre, j'avais l'impression d'être avec une amie à qui je raconterais tous les détails de ma rencontre avec mon nouveau crush. Il était la seule personne qui aurait pu certifier que je n'exagérais pas mes propos, que je ne mentais pas, mais il avait tout oublié sur nous, sur moi, sur notre relation. J'étais donc obligée de tout raconter. Ce n'était même pas seulement lui rafraîchir la mémoire puisque c'était carrément une période de sa vie qui avait été effacée.

Mon récit fut interrompu par un coup de téléphone. Ce n'était pas mon téléphone mais celui du bureau de Hayden, il répondit ce que je compris totalement. En fait, j'espérais que ce soit une urgence et qu'on lui demande de venir tout de suite régler quelque chose. C'était bizarre mais la situation me mettais mal à l'aise. J'avais l'impression de discuter avec un inconnu bien que physiquement il était toujours le même, même sa voix était toujours la même. Mais j'étais une inconnue pour lui. Ces souvenirs qui étaient pourtant de bons souvenirs, ils n'avaient désormais plus la même valeur parce que je ne pouvais même pas les partager avec lui. Je ne pouvais pas rire et lui demander s'il se souvenait de la fois où nous avions fait telle chose ou telle chose. Je trouvais ça triste et dommage.

Il raccroche et j'attends le verdict. Tout ce qu'il me fait savoir c'est qu'un ouragan s'apprête à passer. Je ne comprends pas vraiment ce qu'il entend par ouragan mais j'attends sagement de voir. Puis tout d'un coup les deux grandes portes du bureau s'ouvrent très brusquement. Une jeune femme se présente alors tout en s'excusant pour le dérangement. Je la reconnais. C'est la kiné à qui je raconte ma vie à chaque séance depuis que je suis arrivée à Séoul. Je me sens très gênée de la voir dans cette situation. Je ne sais plus trop ce que je lui ai raconté, mais j'espère vraiment que je ne lui ai jamais parlé de l'histoire avec Hayden, parce que je précise toujours les noms des personnes dont je parle dans mes histoires. Ce serait vraiment un hasard que je lui parle d'un Hayden dont j'étais pratiquement amoureuse à une époque et que je me retrouve ici en présence d'un Hayden.

La jeune femme m'avait fixé sans me laisser savoir si elle me reconnaissait puis elle se concentra sur le but premier de sa venue. Apparemment elle avait des photos à montrer à Hayden pour qu'il donne son avis. J'hésitais sincèrement à m'éclipser à cet instant. Il suffisait de dire que je repasserai une autre fois mais je ne sais pas pourquoi, j'avais peur que ça puisse donner l'impression que l'on cache des choses. Je ne voulais surtout pas que les gens s'imaginent quoique ce soit, alors je n'ai pas bronché et je suis restée assise tranquillement dans le canapé.

La jeune femme vint alors s'asseoir sur le canapé en face du mien alors que Hayden s'absenta pour aller nous chercher de quoi boire. Je ne comprenais pas pourquoi il ne demandait pas à une employée de le faire pour lui, mais bon. Ça me permettait de m'assurer que la jeune femme était bien ma kiné. Je n'avais pas osé demander en la présence de mon ami, je ne savais pas s'il était au courant de son autre job, je ne préférais pas créer de problème. Je m'étais déjà fait remarquer à mon arrivée dans l'agence, je comptais bien repartir sans qu'on ne me remarque plus que ça.

« Lim Ha Neul, donc ? Il me semble qu'on se connaît déjà, non ? Vous êtes bien kiné ? Je suis une de vos cliente... Je ne devrais peut-être pas rester, vous avez du boulot je suppose. J'étais simplement venue prendre des nouvelles de mon ami mais je ne veux pas vous faire perdre du temps... »