« Eomma, je veux la voir ! » Une naissance. Un petit garçon, cinq ans pas plus, qui s’agite autour du berceau. Qui s’agrandit comme il peut, se dresse sur la pointe des pieds pour avoir une meilleure vue.  Son père lui vient alors en aide, le soulevant légèrement  et le visage du petit garçon s’éclaire alors d’une lueur de joie. Il ne quitte pas des yeux ce petit bébé, celle qu’il finira par appeler sa petite princesse. Yoo Bae. C’est sa petite sœur, qu’il va chérir tout au long de sa vie. « Eomma, Appa ! Elle m’a sourit, Yoo Bae m’a fait un sourire ! » Clame-t-il joyeusement. Il est heureux de cette naissance qui vient combler une certaine solitude. Il est heureux, il crie à qui voudra qu’il va être un très bon grand-frère. Puis il réclame, il veut porter sa petite sœur. On la lui donne avec délicatesse, on reste à côté de lui, même si on sait qu’il est bien incapable de lui faire du mal. Il est heureux, juste avec sa petite sœur dans ses bras il est heureux. Yoo Jae, il est heureux avec Yoo Bae.

Et Yoo Jae, c’est moi. La naissance de ma petite sœur, ça a été le début d’une nouvelle vie. Non seulement pour elle, mais aussi pour moi. C’est un événement que je chérirais toujours. Un événement que je n’oublierais jamais.  Elle était tout pour moi, et elle l’est toujours bien entendu, même si c’est un peu différent maintenant.

Je reprends donc le court de l’histoire. Après la naissance de ma sœur, c’est comme si un fil me liait à elle. On ne s’est plus quitté. Et on devenait de plus en plus proche.  Gare à celui qui osait lui faire du mal, parce que vous étiez certains que je rappliquais toujours pour la défendre !  J’étais un grand-frère protecteur et aimant. Les moments de complicité se multipliaient toujours. On s’aimait beaucoup. Voire peut-être trop pour certains. Il y avait bien des fois où les gens venaient se plaindre de notre complicité ambiguë.  C’est vrai, on était souvent collé, on se permettait d’être tactile. Mais c’est parce que j’aimais ma sœur d’un amour pure, d’un amour fraternel. Et encore aujourd’hui, les gestes qu’on a eu dans le passé me manquent. Personne n’aurait pu nous séparer. Du moins, c’est ce que je lui disais pour la rassurer.

Il y a quelqu’un d’autre que j’aimais et que j’admirais énormément aussi : Mon père.  Cet homme était réellement tout pour moi. Et je vous le dis, mais jamais un père n’était aussi aimant avec son enfant. Je pouvais rester des heures à sa boutique de fleur et l’écouter parler des plantes, de cette passion de la botanique  pour ensuite me demander comment s’était passé ma journée. C’est peut-être banal pour vous, mais lorsque j’y repense, c’est comme si on me plantait un pieu dans le cœur. Les meilleurs partent toujours les premiers.

Jamais cette phrase n’avait été aussi vraie. Et c’est toujours douloureux pour moi de ressortir ce souvenir. Ce tournant de ma vie, j’aurais voulu qu’il n’arrive jamais. J’aurais voulu que tout continue dans ce sens, que tout aille bien. Mais ce « tout » a volé en éclat. Je me souviens très bien de cette nuit, où je suis tombé en Enfer. Je m’en souviens.  Je revis la scène chaque soir dans mes cauchemars, c’est pour ça que je retarde toujours le moment du coucher.

uc