Gamine sans histoire, Na Ra est née dans une famille relativement aisée de Corée du Sud où elle a passé la quasi-totalité de sa vie. Membre d'une fratrie de trois, la sœur aînée a très vite pu s'occuper d'un frère deux ans plus jeune qu'elle et d'une benjamine aujourd'hui âgée de 14 ans.
On reconnaissait l'aînée de la fratrie par sa bonne humeur contagieuse tant que par sa discrétion et son charme timide. C'était le genre de gosses qui ne posait aucun problème, silencieuse et parfois trop pour une petite fille de son âge, aussi bien que turbulente à ses heures. Elle avait grandi entourée, aimée, ses parents ne freinèrent jamais ses ambitions et parce qu'ils ne lui imposèrent jamais de norme, elle ne sut jamais qu'elle n'entrait pas dans celle de son pays natal.

Douée à l'école, elle se distinguait tant par sa popularité avec ses camarades que par ses capacités dans les langues étrangères et la littérature, à laquelle elle s'intéressa dès sa première année de lycée. Son application et sa motivation furent les principaux moteurs de sa réussite et, son diplôme bilingue en poche, on lui proposa à ses dix-huit ans de partir à l'étranger pour un an afin de s'y perfectionner avant de rentrer dans une université coréenne.  

Dix-huit ans à peine et c'était le premier grand voyage à l'étranger de la jeune fille, qui arriva à Londres pour y passer une année de sa vie en tant qu'étudiante étrangère. Et elle qui croyait avoir vécu suffisamment pour une fille de son âge se rendit compte qu'elle venait juste de commencer à vivre. C'est à cette époque que Na Ra se découvrit une passion pour le cinéma sous toutes ses formes et pour la caméra, et qu'elle commença à poster ses premières vidéos sur YouTube. Essentiellement composée de vlogs et de playlists, sa chaîne se constitua une petite popularité et un public aussi bien coréen qu'anglais.

Cette année, outre ses enseignements, s'avéra riche en rencontres et c'est cette année que Nara rencontra son premier petit ami. Élèves de la même école et de la même classe, ils s'entendirent immédiatement et très peu après, commencèrent une relation. Na Ra n'avait jamais rêvé du prince charmant ni ne s'était vue comme une princesse, mais ce qu'elle vivait avec lui s'apparentait à un conte de fées. Il était gentil, incroyablement beau, affectueux, elle n'avait jamais réussi à lui trouver un défaut. Mais très vite, les problèmes s'installèrent, la jalousie, et par dessus toi, la jeune femme se rendit compte que ce n'était pas exactement le conte de fée qu'elle recherchait. Ou peut-être que ce fameux défaut qu'elle ne trouvait pas chez lui se trouvait en fait en elle-même.

Le jour de rentrer en Corée venu, il fut convenu entre les deux amants de continuer une relation à distance, jusqu'à ce que l'un puisse déménager dans le pays de l'autre – Na Ra comptait revenir en Angleterre si l'occasion lui était présentée. À peine quelques mois se déroulèrent avant que celle-ci ne formule le besoin de faire une pause, « pour se concentrer sur ses études ». Assumer cette relation lui était devenu difficile, et assumer que ce n'était pas ce qu'elle voulait l'était encore plus. Il sembla l'accepter, avançant que ce serait le mieux pour eux deux.

Mais seulement trois semaines passèrent avant que Na Ra reçoive un appel de la part du jeune homme, l'accusant dans un premier temps d'avoir ruiné sa vie et disant la détester pour ce qu'elle avait fait, puis lui avouant qu'il avait pris des cachets de morphine. Dévastée, Na Ra tenta de le raisonner, appela différentes lignes d'urgence et de suicide, qui furent incapables d'aider, répondant qu'il s'agissait de problèmes privés et que la seule chose à faire était de lui parler. Mais il ne voulait pas être raisonné, sa voix était morte, et Na Ra sut qu'elle ne pouvait rien faire pour le faire changer d'avis. Et ce fut la première fois qu'elle fut confrontée à la mort, et à la culpabilité d'en être responsable.

« Tu sais pourquoi il a fait ça, pas vrai ? »

Après maintes tentatives de l'hôpital, mauvais soins enchaînés, il s'était réveillé dans un état végétatif et la vie de Na Ra s'était brisée. Elle s'était convaincue qu'elle était responsable de son état actuel et que la seule manière pour elle de passer à autre chose était de le voir une dernière fois : elle s'envola avec son père pour Londres, fit difficilement ses adieux et convint de continuer sa vie.

Dès que le jeune homme commença à récupérer, sa famille cessa d'informer son ex petite amie sur son état, et la sœur du garçon continua de l'accuser de la tentative de suicide de son frère. Na Ra crut à toutes ces menaces et finit plusieurs fois à l'hôpital à cause de crises de panique. Impossible pour elle d'avoir le poids de la vie d'un autre humain sur ses épaules et d'en être blâmée chaque jour de sa vie. À son tour, elle essaya de mettre fin à ses jours, oubliant un instant toute la volonté qu'elle avait de vivre et l'envie de s'en sortir, qu'importe combien ça faisait mal.

Mais elle méritait de retrouver sa vie. Elle méritait d'être heureuse à nouveau, parce qu'elle n'était pas responsable de ce qui s'était passé. Il avait eu le choix. Elle avait fait le bon.

Il lui fallut un peu plus d'une année pour se remettre et reprendre sa vie en main, faire la part des choses et s'accepter comme elle l'était, soutenue par ses parents et ses deux cadets. Aujourd'hui étudiante en littérature étrangère, Na Ra continue de créer des vidéos et est devenue relativement populaire sur les réseaux sociaux pour sa personnalité décontractée, son homosexualité enfin assumée et son désir d'aider les autres.